Dans une interview qu’il a accordée à notre rédaction, Sékou Sacko, Président de l’ONG (CITACTS) Citoyens Actifs nous ouvre ici son cœur. Avec lui, en toute sincérité nous avons abordés tous les sujets d’actualités en République de Guinée. Lisez
Le 18 Octobre 2020, le peuple de Guinée a voté dans le calme et la sérénité. Un Candidat s’est autoproclamé vainqueur et un autre a été déclaré vainqueur par les institutions habilitées à le faire. Quelle est votre lecture ?
Nous avons suivi effectivement le vote du 18 Octobre 2020. Il s’est déroulé dans le calme et la quiétude. C’était le couronnement de trente jours de campagne. Nous avons constaté une forte mobilisation de la population pour exercer son devoir civique. Malheureusement ce beau tableau démocratique fut terni par les violences qui ont été perpétrés dans certains quartiers de Conakry. Soit dit en passant que la violence a commencé après l’auto proclamation du président de la principale formation politique d’opposition. Personnellement, je fus très surpris par ce choix du président Cellou puisqu’il n’est pas de nature belliqueux et la légalité a toujours été au centre de ses préoccupations. Mais il reste quand même un être humain, c’est-à-dire amener à se tromper ou à être trompé.
Vous avez fait allusion à la période de Campagne. Quel est projet de Société qui vous a marqué ?
De façon globale, la compagne électorale de cette année fut la plus pauvre en contenu depuis l’adoption du multipartisme intégral après le referendum du 05 Décembre 1990. Les douze candidats ont brillé par la monotonie de leurs discours. Le camp aux affaires qui devaient défendre son bilan, s’est livré plutôt à communiquer sur les prochains chantiers en maquette. Quant aux opposants, ils n’abordèrent que superficiellement et timidement certains thèmes. Aucune énergie remarquable. Il convient de noter quand même que certaines formations telles que PACT (de Mme Makalé TRAORE) ; UFDG (de Cellou Dalein) et MND (de Dr Ousmane DORE) ont mis sur pied une équipe de campagne innovante.
Le peuple retient son souffle en attendant la formation du prochain gouvernement. Selon vous quel espoir devrait-il porté ?
Le prochain gouvernement devrait en priori porté un espoir républicain dans sa composition et dans son fonctionnement. Il devrait mettre en pratique le programme politique du président élu. C’est pourquoi, je me permets de rappeler au président que les deux mandats passés ont été exclusivement consacrés à la récompense de ses compagnons de lutte ou des descendants de ceux-ci. Cette pratique devrait être abandonnée au profit d’un autre élan qui met un accent sur la compétence. Qu’il détecte les talents nationaux partout où ils vivraient pour les mettre au service du pays. La campagne étant terminée, il n’y a plus de militant dans ce pays. Il n’existe désormais que des citoyens guinéens égaux devant la loi et placer sous son autorité.
Pour son efficacité, le futur gouvernement devrait comprendre combien de ministres et quelle structure devrait-il présenté ?
Je ne pense pas être capable d’orienter le choix du président de la République dans la composition de son gouvernement. Mais j’ai constaté un raté notoire dans le choix des ministres pendant les mandats précédents. Comme je l’ai évoqué tout de suite, les différents gouvernements de récompenses n’ont produit aucun résultat consistant. De façon pointue, je suggère une structure de 21 ministères dont un seul Ministre d’Etat et de 4 Hauts Commissariats. Les ministres seront tous placés sous l’autorité d’un premier ministre responsable aux pouvoirs renforcés. Ce choix de la qualité au détriment de la quantité réduira drastiquement le train de vie de l’état et facilitera l’organisation du travail à tous les échelons.
Le tissu social est sorti très déchiré après ces élections. Selon vous qu’est-ce qu’il faut pour réconcilier les Guinéens,
Toutes les périodes électorales ont connu des tensions intercommunautaires dans ce pays depuis la première élection présidentielles du 19 décembre 1993. La fibre ethnique est mise en exergue pour la mobilisation des militants. Ce phénomène s’est particulièrement accentué pendant les dix dernières années. Je pense que le président élu doit faire de la justice impartiale le socle de sa gouvernance pendant ce nouveau mandat qu’il entame. Une application stricte des lois de la république s’impose à tout le peuple sans distinction. Les pires frustrations naissent toujours dans les champs de l’injustice. En dehors de cet aspect politique, les fondements de la cohésion sociale demeurent intacts. Ils tirent ses racines dans notre commune appartenance à la même religion en majorité ; à notre traditionnelle hospitalité et à notre amour commun pour notre pays. Cela s’illustre aisément dans nos cérémonies de mariages, de baptêmes, de décès, dans nos relations personnelles et professionnelles. Chacun a un lien en dehors de son cercle ethnique ou familial.
Le prochain mandat sera consacré à la jeunesse et aux femmes selon le président élu. Quel est ton point de vue ?
Je ne te demanderai pas en retour auxquels les mandats précédents ont été consacrés (rire). Mais cela mérite bien d’être posé comme question au patron. Il revient d’abord à la jeunesse en tant que futur bénéficiaire de créer les conditions d’absorptions des aides qui lui seront orientés. La prospérité passe par elle-même si elle prend conscience de sa situation et fait le tableau de bord de ses besoins. N’a-t-on pas coutume de dire que tout ce qui est fait pour la jeunesse sans la jeunesse est fait contre elle ? Les jeunes doivent faire l’analyse rationnelle de leurs FORCES ; FAIBLESSES ; OPPORTUNITES et MENACES. Cette étude permettra à chacun de connaitre l’ordonnance qu’il lui faut pour être compétitif dans la construction de son avenir et celui de son pays. Aucun régime ne peut être favorable à une jeunesse sans qualification.
Autre aspect, l’état de nos principales routes est catastrophique. Elles sont aux centres de la future gouvernance. Croyez-vous au miracle dans ce domaine ?
Non au miracle. Je crois plutôt à un résultat remarquable si les travaux en cours et les prochains incluent un ensemble de paramètre. D’abord pourquoi nos routes ne tiennent pas pendant deux ans ? La qualité du travail est à pointer en premier certes, mais je vous assure qu’il n’aura jamais de route pérenne sans la réhabilitation des chemins de fer. L’avenir de la route passe forcément par les rails. D’ailleurs toutes les nations qui ont résolus ces questions ont accentué l’effort sur la fiabilisation des transports ferroviaires. Il pleut chez nous presque toute l’année. Aucune route ne peut résister aux charges des citernes de carburant par exemple de Conakry à l’intérieur sans un impact négatif. Mais lorsqu’on acceptera de faire de Mamou la capitale ferroviaire de la Guinée où les lignes (
A-Mali-Labé-Pita-Dalaba et Mamou
B-Yomou-N’zerekoré-Lola-N’zerekoré-Macenta-Gueckedou-Kissidougou-Faranah et Mamou
C-Siguiri-Kankan-Kouroussa-Dabola et Mamou
D-Conakry-Coyah-Kindia) seront toutes rallier, alors nos routes tiendront pendant trente ans.
Cela demande certes du temps, mais il va résoudre toutes nos questions lancinantes relatives à nos routes. Notre port autonome sera le passage obligé de toutes les marchandises pour le Mali puisque les produits seront débarqués presqu’à la frontière.
Malgré son immense ressource, notre pays est toujours pauvre et endettée. Selon vous pourquoi on ne s’en sort pas ?
Je n’évoquerai pas les faits historiques relatifs à la colonisation ou aux circonstances de notre prise d’indépendance et les conséquences qui ont suivi. Après 60 ans d’Indépendance, cet argument est insultant. Notre pays est toujours victime de sa classe dirigeante. Non seulement à cause sa politique souillée par la corruption ; les détournements des deniers publics et le rejet de toutes initiatives sans gain immédiat d’une part ; mais aussi une politique de développement incohérente et décousue. Chaque ministre à sa priorité qui jette dans la boue le projet de son prédécesseur. L’éternel recommencement après chaque nouvelle nomination. Comment s’attendre à un quelconque développement, lorsque la réussite de l’un est considérée comme la défaite de l’autre au lieu d’être le résultat de la continuité de l’action gouvernementale ?
L’exploitation minière en cours et les projets annoncés seront capables de nous développer ?
Les mines n’auront aucun impact positif sur la vie de la population tant qu’un groupuscule continuera à s’accaparer impunément des deniers publics. Tant que les fonds publics serviront à autre chose qu’au développement des secteurs essentiels à une meilleure condition de vie des populations. La condition sine qua non de notre prospérité passe par la sécurisation de nos ressources publiques et par son utilisation rationnelle selon les besoins prioritaires du pays.
Dernier mot ?
(Rire) si le prochain mandat se résumait par la construction d’un seul port de pêche en Guinée, alors le président rentrerait dans l’histoire de ce pays comme un bâtisseur. L’apport de la pêche annuelle dans la rentrée de devise dans notre pays sera plus important que dix ans d’exploitation minière. Comparons juste le prix d’un carton de poisson sur le marché international et celui d’une tonne de bauxite, vous comprendrez mieux ce que je veux dire.
La rédaction