Au cours d’un entretien accordé au Quotidien National Horoya, Abdoulaye Djibril Diallo, coordinateur de la cellule de communication, fait le point de la situation notamment sur le déroulement et de la couverture médiatique dudit procès tant par la presse nationale et qu’internationale.
HOROYA : Le monde entier a aujourd’hui le regard rivé sur la Guinée depuis le 28 septembre dernier suite à l’ouverture du procès criminel du 28 septembre 2009. En tant que coordinateur de la cellule de communication quelle appréciation faites-vous de cet évènement judiciaire tant attendu par les Guinéens et le monde entier ?
ABDOULAYE DJIBRIL DIALLO : Pour moi, une audience comme celle qui porte sur les évènements du 28 septembre, a plusieurs enjeux pour la Guinée.
Le premier, c’est de lutter contre l’impunité et la restauration de l’autorité de l’Etat. Il vous souviendra que depuis le 28 septembre 2009, la Guinée a connu un moment très sombre de son histoire avec justement ce qu’on continue d’appeler les évènements du 28 septembre 2009, où il y a eu plus de 150 guinéens qui ont perdu la vie, des femmes violées. Une couche que nous avons de plus chère, des personnes qui ont été blessées et des familles qui n’ont pas encore retrouvé les corps des siens.
Dans un pays qui se respecte, une telle situation ne peut pas rester dans l’impunité parce qu’il va de la restauration de l’autorité de l’Etat.
Depuis 13 ans, le pays a connu des turbulences. Ceux qui sont engagés à faire le travail, ont été des héros parce qu’ils ont travaillé dans des conditions particulièrement difficiles, du faite que certains parmi ceux qui sont aujourd’hui à la barre, étaient aux affaires. Les juges d’instructions qui ont posé ces actes ont presque risqué leur vie, ainsi que les responsables de l’Association des victimes qui ont fait avancer le dossier.
Pendant treize ans, ce dossier devenait de plus en plus préoccupant pour les populations et les institutions internationales.
Aujourd’hui, bien que nous sommes à mi-parcours du procès et que les décisions ne sont pas tombées encore, il est fondamental que des personnes présumées coupables ou pour lesquelles il y a des charges suffisantes, comparaissent pour expliquer cas par cas, ce que ces personnes connaissent sur les évènements du 28 septembre.
Deuxième particularité du procès, on retrouve un ancien Président, des anciens ministres, des officiers de l’Armée guinéenne, des femmes victimes, des hommes politiques sensés dirigés le pays qui étaient au stade. Donc pour moi c’est un procès de toute notre société.
L’autre enjeu, c’est un procès pénal et l’un des principes directeurs du procès pénal, c’est l’ouverture aux populations et aux médias pour que chacun puisse suivre au cas par cas, le déroulement des faits et se donner une idée de ce qui s’est passé en réalité. Et ce genre de procès, a fondamentalement un caractère pédagogique parce qu’il instruit les autres à travers ceux qui sont à la barre. Et cela permet à chacun de réfléchir avant de poser des actes. Cela permet également de vulgariser les textes de lois. Ce qui veut dire que c’est la démocratie et l’Etat de droit qui sont renforcés par rapport à la tenue de ce procès.
Etes-vous satisfait du rôle que les médias sont en train de jouer ?
Nous, en tant que cellule de communication, chargée de réguler du point de vue technique et professionnelle de la couverture du procès, on se réjoui aujourd’hui que la Guinée s’inscrive dans le concert des grandes nations, celle qui donne une image forte de l’Afrique à travers ce procès. Ce n’est pas par hasard que la presse internationale a qualifié ce procès, de procès du siècle. Donc nous avons une mission. Et notre mission, c’est de faire en sorte que l’opinion nationale et internationale soit informée au cas par cas, minute après minute, jour après jour sur le déroulement de toutes les audiences de ce dossier qui alimente la chronique. Aujourd’hui, on est très satisfait de constater que les médias se sont inscrits dans cette dynamique parce qu’au départ, nous avions des appréhensions. On se posait la question de savoir quel format donner à la couverture médiatique de ce procès.
Que pensez-vous de cette mi-parcours ?
Bien qu’on ne peut pas se réjouir avant la fin du procès, mais on se dit effectivement que la presse s’inscrit dans la dynamique de la cellule de communication, parce que nous avons pensé qu’au lieu qu’on aille copier toujours ce que les autres font, pour une rare fois, que les autres copient ce qui se passe en Guinée. Nous avons fait sauter le verrou de la restriction, parce que même au niveau de la Cour Pénal Internationale (CPI) les procès sensibles comme celui du 28 septembre, se couvrent en différé. On s’est dit que la Guinée aussi aura le Label, le privilège aujourd’hui de montrer à la face du monde qu’on peut couvrir intégralement et en direct un tel procès sans restriction. Et que cela permet justement d’avoir la pédagogie à cet effet.
Le mérite revient à la cellule de communication qui a eu cette initiative et d’avoir confiance aux médias guinéens. Et ces médias qui, aujourd’hui sont en train de mériter cette confiance.
Et l’autre enjeu que nous avons sur ce procès, c’est la dimension politique, parce que n’oublions pas que ces événements qu’on couvre aujourd’hui, sont jugés et réunissent fondamentalement tous les Guinéens à travers ce palais de justice.
Le procès est passé d’hésitation en hésitation parce qu’il faut le dire aisément que la volonté politique n’a pas toujours accompagné le procès. Il a fallu donc le Président de la Transition, Colonel Mamadi Doumbouya, afin que cette situation soit éclaircie. Pour cette mi-parcours, nous sommes satisfaits de l’évolution du procès, parce ce que pour une fois encore, la Guinée est en train de donner de leçons au monde entier en matière de justice.
Propos recueillis par Kalifatou Doumbouya
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